Culture et monachisme[1]

 

 

Introduction:

 

            Le monachisme est une réalité  transculturelle, et cela en deux sens différents.  D'abord parce qu'il n'est le monopole d'aucune culture.  Nous le retrouvons en de très nombreuses traditions culturelles de l'humanité.  Chaque fois qu'une culture atteint un certain niveau de spiritualité, apparaît le phénomène monastique (cf. hindouisme, bouddhisme, monde hellénique, judaïsme tardif)[2].  Le monachisme est aussi transculturel dans un autre sens; à savoir, que c'est le propre du moine de poursuivre un cheminement solitaire au-delà du support culturel offert par la culture sociale et religieuse environnante[3].

 

            Cependant, le monachisme est aussi une réalité culturelle -- et cela aussi en deux sens différent.  D'abord parce qu'il est nécessairement vécu dans une culture déterminée; ensuite parce qu'il constitue une sous-culture à l'intérieur de celle-ci (p.e. le monachisme chrétien est une sous-culture chrétienne).

 

            Jésus a vécu avec ses disciples immédiats un certain style de vie décrit dans les Évangiles.  Dès la première génération chrétienne une culture chrétienne s'est rapidement développée du fait que les premiers chrétiens, provenant soit du judaïsme, soit du paganisme, laissèrent le message évangélique et les valeurs que ce message véhiculait transformer leur vie.

 

            À une date très ancienne, des chrétiens et des chrétiennes, tout en demeurant en communion avec leur Église locale  se retirèrent au désert. Bientôt d'autres vinrent se mettre à leur école.  Dans les milieux anachorétiques de Basse Égypte il s'agissait de la transmission d'une expérience spirituelle du maître au disciple, selon le style de formation déjà pratiqué dans les didaskalia ou "écoles" catéchétiques comme celle d'Alexandrie où avait enseigné Origène.  Le charisme d'un Pachôme, en Haute Égypte, ou d'un Basile, en Cappadoce, fut de créer un style de vie (une politeia ou conversatio) à travers laquelle était transmise cette expérience. 

 

            Ces premiers coenobia sont la première expression de la culture monastique chrétienne.  On y retrouve tous les éléments d'une culture: une compréhension du sens de la vie et une échelle de valeurs correspondante; des institutions et une tradition exprimant cette compréhension, et une interprétation de l'expérience vécue.

 

            Ce qui est essentiel, c'est l'expérience spirituelle qui caractérise le moine, et aussi le fait que toute son existence est organisée autour de cette expérience (cf. archétype universel).  Cette expérience s'incarne dans des institutions essentielles (les grands renoncements) qu'on retrouve dans toutes les formes monastiques à travers les âges, et dans beaucoup d'autres institutions et coutumes qui varient constamment d'une région à l'autre et d'une époque à l'autre.

 

            On peut parler de "culture monastique" dans le même sens que l'on peut parler de culture chrétienne.  Il n'y a pas "une" culture monastique parallèle aux cultures dites profanes.  Il y a place pour autant de cultures monastiques qu'il y a de cultures humaines authentiques: cultures humaines christianisées et "monasticisées". L'étude de l'histoire du monachisme nous révèle une très grande pluralité des formes de vie monastique dès la première génération[4].

 

            Nous vivons toujours notre monachisme dans une culture humaine déterminée: si ce n'est pas celle de notre pays, c'est celle d'un autre pays ou d'un autre continent; si ce n'est pas celle de notre temps, c'est celle d'un autre siècle.

           

            On parle facilement aujourd'hui du monachisme comme d'une "contre-culture".  Cette expression est très ambiguë.  En réalité l'histoire nous révèle que chaque fois que le monachisme a connu une période de croissance rapide ou de réforme profonde, ce fut lorsque les moines -- ou au moins quelques-uns -- furent particulièrement présents à la culture de leur temps, c'est-à-dire aux aspirations spirituelles profondes des hommes de leur temps et de leur lieu.  Les meilleurs exemples sont le monachisme pachômien et les origines cisterciennes.

 

 

Quelques aspects du contexte culturel du monachisme égyptien

 

a) Le Père spirituel du désert

 

            Dans la vie d'Antoine, écrite par Athanase, nous voyons que lorsqu'Antoine décide de tout quitter pour vivre la vie ascétique, il se met aussitôt à la recherche d'anciens qui vivaient déjà cette vie au désert proche de leur résidence. Puis il devint lui-même un de ces Pères spirituels charismatiques; le plus fameux.  En peu d'années beaucoup de moines peupleront les déserts à l'Ouest d'Alexandrie, sous la direction de nombreux pères spirituels[5].

 

            Cette fonction du père spirituel du désert fut-elle un développement original du monachisme primitif, ou bien a-t-elle des antécédents dans la culture religieuse du temps?  En réalité, cette pratique ou tradition a beaucoup en commun avec une tradition de l'Église primitive, spécialement celle de l'Église d'Alexandrie: la tradition du didaskalos ou de la didaskalia.  La fonction du père spirituel au désert doit être vue comme analogue à celle du didaskalos dans l'Église primitive[6].  Ces didaskaloi (enseignants) sont mentionnés dans les lettres de saint Paul avec les apôtres, les prophètes, les évangélistes et les pasteurs[7]. On les retrouve dans d'autres écrits du christianisme primitif.  A l'origine, ils fonctionnaient en vertu d'un charisme personnel spécial. Plus tard, à la fin du deuxième siècle et durant le troisième siècle, ils ont une position officielle d'enseignement dans l'Église et préparent les catéchumènes au baptème.

 

            L'Ecole d'Alexandrie fut la plus fameuse de l'Antiquité. Pantène et Clément (deux laïcs) prirent la direction de cette école comme responsabilité personnelle, comme Justin l'avait fait à Rome.  Mais Origène, successeur de Clément, fut installé officiellement par l'Évêque Demetrius comme chef de l'école, avec tâche de préparer les candidats au baptême.  Il avait 18 ans[8].

 

            Ce style de formation était commun dans les centres philosophiques de l'Orient pré-chrétien, aussi bien dans les milieux philosophiques grecs (platoniciens ou épicuriens) que dans la tradition hermétique d'Egypte[9].

 

            Pour nous, qui, dans nos écoles, passons d'un professeur à l'autre, d'une classe à l'autre, et d'une école à l'autre, il est difficile d'imaginer l'intensité des relations qui existaient dans l'antiquité soit païenne soit chrétienne entre un maître et le groupe de disciples qui vivaient avec lui.  C'est dans de petits groupes de ce genre que s'est développée toute la culture chrétienne des premiers siècles.  La rencontre personnelle avec un maître spirituel était considérée par beaucoup comme un moyen essentiel de progrès spirituel.  Des personnages importants faisaient de très longs voyages parfois simplement pour rencontrer de tels maîtres (Egérie). L'historien Eusèbe nous parle d'un évêque qui faisait régulièrement le voyage de Cappadoce jusqu'en Palestine pour approfondir sa vie spirituelle en s'asseyant aux pieds d'Origène.

 

            L'instruction, dans ces écoles, embrassait toute la vie.  Pas simplement intellectuelle, elle comportait aussi la purification des moeurs et du coeur. Il semble qu'Origène ait vécu avec ses collègues et ses disciples une sorte de vie quasi monastique, toute centrée sur la lecture en commun de la parole de Dieu[10].

           

            Origène ne fut pas un moine au sens propre; mais il a eu une influence énorme sur le monachisme naissant. Il est né d'une famille chrétienne, et son père meurt martyr avec un groupe de chrétiens d'Alexandrie vers l'an 200.  Aîné d'une famille de sept enfants, sa mère doit cacher ses vêtements pour l'empêcher de courir au martyre. Il est mis à la tête du didaskalion à 18 ans. Durant une nouvelle persécution, il continue à encourager publiquement les martyrs, alors que tout le clergé d'Alexandrie se cache.  Ne se mêlant pas aux affaires de la société de son temps il se considère avant tout comme un exégète. Il passe toute sa vie dans l'étude, la méditation et l'enseignement de la Parole de Dieu.

 

            Il utilisa la philosophie, mais avec liberté. Il n'était pas un converti de la philosophie comme Justin ou Clément d'Alexandrie. Il étudia au contraire la philosophie  en tant que chrétien (cf. l'image de l'Israélite pillant les Egyptiens). Des générations de moines l'ont reconnu comme un maître spirituel (au delà des doctrines qui furent condamnées).

 

            Quand, plus tard, des centaines et des milliers d'hommes et de femmes allèrent au désert pour chercher la direction spirituelle près d'un père charismatique, ils cherchaient ce qu'Origène et d'autres didascales avaient offert dans la ville.  La disdaskalia, l'École de vie, se transféra de la ville au désert.  À cet égard, la venue d'Évagre au désert, en 383, constitue une date de première importance dans l'histoire du monachisme.

 

 


Pachôme[11]

 

            Le monachisme de Basse Egypte était lié de bien des façons à Alexandrie, grande métropole où se rencontraient toutes les cultures, principalement de langue grecque, et où existait une forte colonie juive et une forte chrétienté.  Antoine, le principal représentant de ce monachisme était de famille chrétienne, et avait reçu son appel au cours de la liturgie. Dans ce contexte de Basse Égypte, pour trouver la solitude, on s'éloigne de la ville, et on transpose dans le désert les éléments de la culture chrétienne locale qui sont alors adaptés.

 

            Les choses sont très différentes chez Pachôme:  La Haute Égypte est une province lointaine, restée profondément copte, où le christianisme est une faible minorité, et où le grec est presque inexistant. Peu de villes importantes, mais des colonies de paysans tout le long du Nil, souvent grevés par les impôts. On y connaissait déjà une forme d'anachorèse civile et politique.

 

            Tout juste avant l'ère de Pachôme, Dioclétien, qui fut empereur de 284 à 305, opéra une importante réforme militaire et administrative[12].  Dans le passé, la Haute Egypte avait été connue pour sa propension à se rebeller contre l'occupant romain.  Dioclétien eut la sagesse de donner à l'Egypte une structure propre, différente de celle de l'Empire, avec en même temps beaucoup d'autonomie concédée aux diverses administrations locales et une forte relation hiérarchique entre celles-ci et la métropole.  Sur la base de cette autonomie et de ce réseau de communication, les chefs de l'Église, Athanase en particulier, pourront exercer une influence considérable sur l'ensemble du territoire une fois que Constantin aura instauré un régime de tolérance religieuse.

 

            Athanase devient patriarche tout juste à ce moment-là, et en la même année, 328, Pachôme fonda son premier monastère.  Athanase eut d'ailleurs la sagesse de percevoir quelle force ce monachisme pourrait être pour l'Église.

 

            Pachôme arriva donc tout juste à temps, et sut profiter au maximum de ce nouveau contexte politique. Il établit ses monastères non pas dans le désert, mais sur la rive du Nil, dans les centres d'activité civile, politique, ecclésiastique et économique.

 

            La réforme de Dioclétien comportait aussi une réforme agraire importante en Egypte.  Jusqu'à ce moment-là, toute la terre était publique;  c'est‑à‑dire appartenait à l'État.  Au début du troisième siècle, de nombreux paysans fermiers avaient commencé à cultiver des parcelles de terre publique.  La réforme de Dioclétien, d'une part fit passer ces parcelles à la propriété privée, et d'autre part encouragea un type de coopérative entre ces petits propriétaires agraires dans la production, les rendant collectivement responsables du payement des taxes.  La structure économique des monastères pachômiens profita beaucoup de cette situation nouvelle, et permit à Pachôme d'insister sur l'autosuffisance économique de ses monastères à travers leur propre travail (soit le travail sur leurs propres terres, soit le travail à gage).  Cela explique aussi son goût pour les fédérations.

 

            C'est là un phénomène que l'on retrouvera souvent dans l'histoire du monachisme, aussi bien en Orient qu'en Occident: un grand développement (numérique) du monachisme suit toujours une période de changements profonds de caractère social et économique.  Les moines sont alors en général à la pointe de leur culture.  Ils savent utiliser une nouvelle situation pour développer une nouvelle culture.

 

            Les monastères pachômiens sont souvent établis dans des villages, abandonnés ou presque, où le peuple revient après l'établissement de la communauté monastique.  Il s'établit en général une relation harmonieuse entre le monastère et la population du village; tout l'opposé d'une "contre-culture".

 

            Tous les monastères sont reliés entre eux dans une grande Congrégation. Chaque monastère est largement autonome; mais il y a une administration centrale. Se développe peu à peu un style de vie commune qui aura une influence sur la culture égyptienne et, par la suite, sur la culture chrétienne universelle, en particulier sur toutes les formes de vie religieuse.

 

 

Un coup d'oeil sur les grands mouvements de l'époque

 

            Les nombreuses études faites au cours des trente ou quarante dernières années -- et surtout les publications de textes récemment découverts -- sur le gnosticisme, le manichéisme et le messalianisme, nous donnent une vue renouvelée du contexte religieux et culturel dans lequel est né le monachisme primitif.

 

            Nous savions déjà que le monachisme n'est pas né en Égypte pour se répandre ensuite dans l'Église universelle, comme le présentaient les ouvrages classiques de l'histoire du monachisme.  En fait, il est né à peu près simultanément dans toutes les Églises locales d'Orient et d'Occident, et de la vitalité même de chaque  Église locale.  Il est également apparu en continuité directe avec un fort mouvement d'ascétisme (parfois appelé pré-monastique) dans chacune de ces Églises, surtout dans les communautés judéo-chrétiennes.

 

            Nous ne devons pas oublier que non seulement les Esséniens et les Thérapeutes d'Alexandrie, mais aussi des mouvements religieux comme le gnosticisme et le manichéisme avaient leurs moines et leurs monastères.  Il serait enfantin de chercher des lignes directes de dépendance.  Ce qui ressort de plus en plus clairement des études des dernières décennies sur l'ascétisme ancien, c'est que tous ces mouvements s'enracinent dans un même courant spirituel, de caractère baptiste et d'orientation ascétique qu'on retrouvait non seulement dans le judaïsme tardif mais aussi à travers tout le Moyen Orient au temps de Jésus[13]. 

 

            Le monachisme chrétien, tel que nous le connaissons à partir de la fin du troisième siècle et du début du quatrième, est le fruit d'une inculturation progressive, au sein du christianisme, de ce grand mouvement spirituel et ascétique.  Autrement dit, ce courant, une fois assumé par les chrétiens, a bien produit un certain nombre d'hérésies et d'aberrations, mais il a aussi produits des fruits spirituels d'une authentique grandeur.  Le monachisme chrétien est un de ces fruits.  Il est le fruit de la purification graduelle d'un courant spirituel antérieur au christianisme et présent à travers tout le Moyen Orient au temps de Jésus et de son insertion dans le courant ascétique venu directement de l'Évangile.  Un exemple admirable d'inculturation réussie.

 

 

Coup d'oeil rapide sur l'Occident

 

            Les origines du monachisme occidental restent assez obscures[14]. Longtemps on a pensé qu'il devait ses origines à l'influence du monachisme oriental. Mais il est généralement admis, aujourd'hui, qu'il est né, comme en Orient, de la vitalité de chaque Église locale.

 

            Mais la situation culturelle est très différente. D'abord, beaucoup des Églises primitives d'Orient avaient comme contexte culturel la tradition religieuse du judaïsme et d'autres courants spirituels qui ne manquaient pas de grandeur.  En Occident, la religion publique de l'Empire n'avait rien de comparable.  Elle était devenue une religion d'état dans laquelle bien peu, en fait, croyaient.

 

            Et il faut ajouter que le monachisme latin se développa à travers tout le monde occidental au moment des grandes invasions barbares, et donc au moment de l'écroulement de l'Empire romain occidental.

 

            Quelques notes caractéristiques: le monachisme occidental primitif fut le fait d'individus (parfois nombreux) plus que de toute l'Église ou même d'une Église locale entière. Il fut dès le début le fait d'une élite reconnue comme telle et considérée comme la gloire des Église locales au moment où l'Empire romain était en pleine décadence morale.

 

            Deux autres aspects à mentionner: a) le rôle des femmes, vierges et veuves, surtout dans l'Afrique du temps de Cyprien et de Tertullien; b) le caractère "cultivé" de plusieurs milieux monastiques (Rufin, Paulin de Nole, Sulpice Sévère, Augustin, Jérôme).

 

 

Un cas intéressant: le monachisme de Rome au temps de Jérôme

 

            Peter Brown, dans son livre The Body and Society, au début du chapitre sur Ambroise, donne une bonne description de la situation de l'ascétisme romain au temps d'Ambroise, d'Augustin et de Jérôme[15]. 

           

            Quelques décennies après l'Édit de Milan, l'Italie était encore une région peu christianisée, très conservatrice, où le culte païen actif était demeuré une partie de la vie publique.  Les hommes continuaient à suivre la religion de leurs pères dans la vie publique, longtemps après la conversion de leur mère, de leur soeur ou de leur épouse au christianisme.  S'ils voulaient continuer leur vie publique, ils devaient retarder leur adhésion à l'Église.  Tout au plus ils devenaient catéchumènes et venaient rarement à l'Église, attendant parfois jusqu'à la fin de la vie pour recevoir le baptême.

 

            L'Évangélisation se fit en premier lieu dans les villes (païen = paysan); et cela explique que beaucoup des premières conversions appartenaient aux familles de la classe élevée de la société.  En Italie, il n'y avait pas de désert où se réfugier, comme en Egypte.  En conséquence, le désert des grandes ascètes romaine était leur maison privée.  Là elles vivaient dans la prière; là aussi elles recevaient le clergé romain et tenaient des conférences de théologie et de spiritualité.  Ces femmes eurent un impact très grand sur la société, à la fois à cause de leur sainteté, et à cause de leur richesse, avec laquelle elles aidèrent beaucoup l'Église et les monastères, et aussi à cause du rôle que plusieurs d'entre elles jouèrent comme conseillères spirituelles.  On peut mentionner entre autres les deux Mélanie et Paula.

 

            L'année 382 fut importante en Occident (comme l'an 383, année de l'arrivée d'Évagre au désert, le fut en Orient.)  À cette date, un grand génie arrivait à Rome.  Il s'appelait Jérôme.  Comme Évagre lors de son arrivée en Égypte, il avait plus ou moins 40 ans. C'était  un homme de grande expérience et d'une érudition exceptionnelle.  Il était né dans le monde latin (à la limite, aux confins de la Dalmatie et de la Pannonique). Après un excellent cours de grammaire et de rhétorique à Rome, il étudia le grec à Antioche. Il passa deux ans comme ermite dans le désert de Chalcis, puis se rendit à Constantinople où il étudia aux pieds de Grégoire de Naziance. Il approfondit Origène, qu'il considéra toujours comme un des plus grands docteurs.

 

            Arrivé à Rome en 382 comme "protégé" du Pape Damase, il devient le directeur et le tuteur de toutes les grandes dames ascètes de l'Aventin, particulièrement de Marcella, une veuve âgée, et de Paula , jeune veuve de moins de 30 ans, encore anéantie par la mort récente de son mari.  Jérôme aimera toujours tendrement cette dernière comme sa propre fille).

 

            Jérôme avait de grandes qualités  mais la diplomatie n'était pas son fort.  Il possédait probablement une forme authentique d'humilité, mais celle-ci s'accompagnait d'une certaine arrogance... Il ne cachait pas son mépris pour le clergé romain, qu'il se mit entièrement à dos en peu d'années.  Après la mort de Damase, son protecteur, il dut quitter Rome pour la Palestine, où il continua d'être le tuteur des grandes moniales romaines.

 

 


Réforme carolingienne[16]

 

            Le développement du monachisme en Occident se réalisa au moment même où l'Europe entrait dans une ère de ténèbres et de barbarie; et c'est peut-être là son aspect le plus extraordinaire.  À partir du début du 5ème siècle, nous assistons à un repliement préoccupant de la civilisation, qui se manifeste dans une dégradation des moeurs et un abaissement du niveau de la culture.  Dans l'Église elle-même on assiste à une certaine contamination de la foi et des coutumes par des usages païens.  Les moines firent beaucoup pour maintenir les valeurs morales mais eux aussi furent touchés par le mouvement de décadence.  Les monastères étaient souvent des noyaux de nouveaux convertis qui n'avaient guère reçu plus qu'un vernis de christianisme; et finalement la ferveur et les coutumes monastiques se détériorèrent progressivement comme les coutumes cléricales. 

 

            Comme l'avait fait Justinien en Orient, Charlemagne s'appliqua à la réforme de toute l'organisation ecclésiastique de son royaume: initiative qui s'insérait parfaitement dans ses vues politiques.  Il s'occupa particulièrement des chanoines et des moines.  Près des églises on trouvait souvent des groupes d'ecclésiastiques qui vivaient soit une vie vraiment monastique, soit une forme plus large de vie commune.  Charlemagne ordonna qu'on mette fin à cet équivoque et qu'on adopte ou bien la vie des moines dans un cloître selon la Règle de saint Benoît ou la vie des chanoines selon la Règle de saint Crodegang. 

 

            Fort de l'appui de Charlemagne et de son successeur Louis le Pieux, Benoît d'Aniane se consacra à promouvoir cette réforme. Un "Capitulare monasticum" fut rédigé pour préciser l'interprétation et l'application de la RB, au Synode d'Aix-la-Chapelle de 817.

 

            Cette réforme monastique eut le même sort que la renaissance carolingienne dans son ensemble.  En effet, cette première tentative de fonder la paix, la prospérité et la civilisation sur les ruines de l'Empire romain, fut un échec et l'empire de Charlemagne se désagrégea.  De nouvelles hordes  barbares envahirent l'Europe, les Vikings au nord, les Sarrasins au Sud et les Hongrois à l'est.  Une autre période noire pour l'Occident.

 

            Au 9ème siècle, quand les Institutions féodales atteignent leur plus haut niveau de développement, on assiste, dans le contexte du monde ottonien, à une compénétration toujours plus grande de l'Église et de l'État.  Commence alors à se dessiner dans l'Église un mouvement de réforme qui donnera de nouvelles bases à la chrétienté.  Ce fut d'abord la lutte des Investitures et la lutte contre la Simonie et le Nicolaïsme, qui atteint son sommet durant le pontificat de Grégoire VII (1073-1085), d'où le nom de réforme grégorienne. Commence alors en Occident trois siècles grandioses dont l'art gothique est la plus belle expression. Période extraordinairement riche en hommes illustres, esprits créateurs, où abondent mystiques et saints, mais aussi époque où Byzance tombe sous les coups des Croisés!... Cependant en 961 Athanase, le moine, s'inspirant de la réforme studite posait la première pierre du monastère de Lavra sur le mont Athos...)

 

            À partir de la Réforme carolingienne, il y a en Occident une très grande compénétration de l'Église et de l'Empire, qui semble faire partie de la nature des deux institutions.  L'empereur étant à la cime des pouvoirs terrestres est considéré comme le Vicaire du Christ sur la terre, et intervient dans les affaires de l'Église, dont il est responsable.  D'autre part les évêques interviennent constamment dans les affaires politiques.

 

            Ce système avait ses avantages pour les deux parties.  Mais il comportait aussi ses ambiguïtés.  L'idéologie avait uni les réalités les plus profanes à la vie spirituelle la plus authentique.  Les sujets de l'empereur et les fidèles de l'Église étaient une seule et même personne, un seul et même peuple.  La guerre et l'extension de l'Église allaient de pair.

 

            Au siècle suivant il y a un transfert gigantesque des biens de l'Église aux laïcs qui sont les amis du roi.  Il y a une confusion entre la fortune du prince et celle de l'Église.  Les monastères souffrent encore plus de cette situation, parce qu'ils sont tous dépendants du roi.  Graduellement on installe des abbés laïcs plus préoccupés d'accaparer les biens des monastères que de la santé spirituelle de la communauté.

 

            Cela souligne ce que la réforme de Benoît d'Aniane avait d'incomplet sur un point capital:  la nomination des abbés.  Celle-ci était dans toutes les abbayes royales de la compétence du souverain, et n'excluait pas l'installation d'un laïc.  Cette pratique n'avait pas donné que de mauvais résultats... Cependant, après le partage de Verdun, les rois paraissent moins riches et plus soucieux de satisfaire les désirs des grands pour élargir leur clientèle.  Donner une abbaye devient un moyen normal de récompenser un serviteur, d'avantager un ami et de doter des filles.  Les évêques eux-mêmes n'hésitent pas à donner les abbayes qui relèvent d'eux à des laïcs.

 

            Les événements rendent ces nominations encore plus désastreuses lorsque la mission de l'abbé laïc consiste à mobiliser les ressources pour faire la guerre. Les rois appauvris gardent pour eux la fonction d'abbé. Ils la concèdent à leurs meilleurs hommes de guerre.

 

            Certaines abbayes anciennes continuent cependant de briller d'un éclat incontestable,  par exemple Saint Gall et Gorze. Le renouveau monastique s'appuiera à l'évidence sur ces monastères restés fervents[17].

 

 

CLUNY[18]

 

            L'abbaye de Cluny, en Bourgogne, près de Mâcon, fut fondée dans une période de grande confusion, quand la Règle de s. Benoît n'était presque plus observée.  Cette fondation fut le résultat d'un accord entre deux hommes éminents, le duc d'Aquitaine Guillaume le Pieux et l'abbé Bernon, abbé de Baume dans le diocèse de Besançon, vers l'an 908. Tous deux étaient convaincus qu'une des raisons principales du triste sort de l'Église et du monachisme était l'incapacité dans laquelle ils se trouvaient de se défendre contre les ingérences du pouvoir laïc.  En conséquence, dans la Charte de fondation, ils se mirent d'accord pour accorder à Cluny sa libertas.

 

            L'affranchissement de Cluny s'étend aussi au domaine spirituel.  Dans le droit de l'Église ancienne les monastères dépendaient de l'évêque qui exerçait sur eux l'autorité disciplinaire et le pouvoir sacramentel de conférer les Ordres sacrés.  Les moines de Cluny se trouvaient exempts de cela et dépendaient directement du Pape. Ce prestige les mettait à part. L'autorité du pape s'exerçait sur les prieurés à travers l'abbé de Cluny. Il y avait donc un Ordre au sens propre. 

 

            Les premiers abbés de Cluny furent de grandes figures.  Après 30 ans la Congrégation avait 17 monastères; 1000 à la fin du 12ème siècles.

 

            Précisément ce qui faisait la grandeur de Cluny était une semence de décadence.  Cluny représentait la pleine réalisation de l'esprit de la réforme carolingienne de 817 plus que l'esprit de saint Benoît.  Avec une grande ouverture d'esprit, on avait trouvé la solution aux problèmes contemporains. Mais cette réforme n'incarnait pas une vision pour l'avenir.  Il n'y avait pas encore dans le peuple de Dieu une aspiration forte à quelque sorte de renouveau.

 

            La structure monarchique de Cluny efficace pour lui donner sa libertas  en soustrayant les monastères à l'autorité civile et à celle des évêques, n'avait rien de bénédictin. Elle allait contre l'esprit bénédictin du monastère comme communauté autonome et devint à proprement parler une hiérarchie féodale au moment où le système féodal, ayant atteint son sommet, allait se défaire.

 

            Une crise s'annonçait.

 

 

Crise du cénobitisme

 

            Précisément à ce moment, c'est-à-dire à partir d'environ 1050 et durant plus ou moins un siècle, le monachisme occidental connut une crise profonde, que Germain Morin a appelée une "crise du cénobitisme".

 

            Parmi les causes de cette crise il faut sans doute compter l'enrichissement des monastères; mais beaucoup d'autres facteurs entrèrent en ligne de compte.  La cause globale de cette crise fut l'incapacité du monachisme traditionnel, même sous sa forme la plus réussie (celle de Cluny), de satisfaire les âmes généreuses qui commençaient à aspirer à des solutions plus radicales.

 

            Dans l'histoire du monachisme, les monastères avaient été fondés aussi bien près des villes que dans la campagne.  Chacune de ces deux traditions comportait ses avantages et ses difficultés, et chacune trouvait un fondement dans la tradition.  Au cours du onzième siècle la tendance se généralisa d'établir les monastères près des villes ou des lieux fortifiés (en grande partie pour des raisons de sécurité).  Dans ce contexte, les moines furent de plus en plus appelés à répondre aux besoins (spirituels et matériels) des populations environnantes.  La conception populaire du monastère devint celle d'une communauté constamment occupée soit à des services religieux très longs, soit divers types de services sociaux.

 

            Au même moment on constate dans l'Église, au sein des monastères comme au dehors, un nouvel intérêt pour les Pères de l'Église.  On lit et on étudie avec assiduité Ambroise, Augustin, Jérôme, Hilaire, Boethius, Cassiodore.  Mais avant tout, dans les monastères, on lit Cassien; et ses Conférences eurent certainement une grande influence sur le renouveau érémitique du onzième siècle.  On peut aussi mentionner la popularité d'Origène, de plus en plus lu surtout depuis le neuvième siècle, même si pas toujours sous son vrai nom.

 

            Le onzième siècle est caractérisé par une grande créativité intellectuelle.  Les auteurs de ce siècle ne se contentent pas de lire les Pères.  Il élaborent une nouvelle synthèse de l'enseignement traditionnel.  On perçoit une attention spéciale pour le sujet humain dans sa relation avec Dieu.  Déjà Augustin avait décrit le cheminement spirituel comme une affaire entre l'âme et Dieu et avait, pour ainsi dire, intériorisé Dieu.  Mais on ne trouve pas chez lui, de façon explicite, une grande attention à la personne du Christ.  En tout cas, l'humanité du Christ était laissé un peu dans l'ombre.  La grande innovation du onzième siècle, dans le domaine de la spiritualité, fut la recherche d'une relation personnelle avec le Christ, et particulièrement avec l'humanité du Christ.  Le but que se donne la personne spirituelle est d'imiter le Christ, spécialement le Christ homme, soumis au Père, faisant la volonté du Père, humble et plein de compassion pour ses frères, au point d'accepter la souffrance et la mort sur la croix.

 

            On trouve aussi dans le peuple de Dieu une faim de contemplation. Les auteurs spirituels utilisent souvent alors le mot grec theoria, familier à Cassien.  En relation avec cette recherche de la contemplation des réalités divines, toutes les choses du monde extérieur ne semblent qu'une occasion de distraction et n'ont rien à offrir à l'âme contemplative.  La conviction -- qui se fait de plus en plus forte -- que cet idéal de contemplation ne peut se réaliser dans le monde, inspire la littérature de la fuga mundi.

 

            Tout cela eut comme premier résultat le développement d'un mouvement érémitique considérable.  L'individualisme qui caractérisait ce siècle tenait à faire du salut une affaire strictement personnelle.  D'autre part les âmes avides de contemplation ne trouvaient pas que les monastères existants, si fervents fussent-ils, leur offraient l'atmosphère nécessaire pour la contemplation et la tranquillité.  Ces monastères étaient devenus riches et leur vie comportait beaucoup de ritualisme.  Un nombre toujours plus grand de moines étaient ordonnés prêtres, acceptaient des paroisses et prenaient des laïcs comme serviteurs.  Certains devenaient évêques.  Tout ceci conduisit un bon nombre d'âmes ferventes à penser que les moines n'avaient vraiment pas laissé le monde, et à décider de faire leur salut personnel en se retirant dans la solitude pour lutter contre le démon et se vouer à la contemplation. 

 

            Au même moment apparaissaient les prédicateurs errants dont beaucoup, de façon paradoxale, étaient des ermites.  Il s'agissait d'un mouvement complexe dont l'aspect peut-être le plus nouveau était que les illettrés et les pauvres, auxquels l'Église de l'époque féodale n'avait pas donné grand place, commençaient à faire entendre leur voix.   Mais c'était aussi le temps de grands esprits et de grandes intelligences, comme un Pierre Damien, un Lanfranc, un Anselme, un Bernard, un Bruno, un Gratien et tant d'autres.  Les illettrés et les savants parlaient différemment, mais des mêmes choses.  La même aspiration était au coeur de tous. 

 

            Le résultat de cette faim de Dieu et de cette recherche spirituelle quasi universelle à travers toute l'Europe de l'Ouest durant ces siècles, fut le développement graduel d'une compréhension commune de la situation ecclésiale.  Un certain consensus se développa dans la population en général concernant l'Ordre monastique idéal qu'on voudrait voir apparaître.  Le succès des grandes réformes monastiques des années suivantes vint du fait qu'elles répondaient à une attente de l'ensemble du peuple chrétien.

 

            Cluny avait perdu sa popularité.  Non pas que l'observance monastique y était décadente, ou que la discipline s'y soit relâchée; mais simplement parce que ses grandes communautés étaient devenues riches en propriétés matérielles et impliquées dans la société féodale contemporaine et la politique nationale et internationale... précisément au moment où le peuple chrétien aspirait à un retour à la paupertas Christi et à l'idéal de l'ecclesia primitiva.  Ce à quoi on aspirait, ce n'était plus une réforme, mais bien un renouveau.  Les temps étaient mûrs pour l'apparition d'un nouvel Ordre monastique.

 

La Réforme de Cîteaux

 

            L'essor rapide de l'Ordre de Cîteaux durant le premier siècle de son existence -- un essor qui n'a probablement rien de comparable dans l'histoire de la vie religieuse chrétienne -- fut dû, en particulier, au fait que Cîteaux incarnait la réponse aux aspirations religieuses et humaines les plus profondes des populations chrétiennes de son temps.  Cîteaux se situait, en particulier, dans la ligne du mouvement érémitique du onzième siècle.  Ce n'est pas pour rien que, dans les premiers écrits de l'Ordre, le nouveau monastère est appelé un eremus.  Le génie de Cîteaux fut de "récupérer" l'aspiration à la solitude que véhiculait le mouvement érémitique et de réintégrer cette aspiration à l'intérieur d'une vie explicitement et authentiquement cénobitique. 

 

            Le cas de Cîteaux exigerait, bien sûr, un long développement.  Qu'il suffise  pour le moment de signaler que se vérifie une fois de plus dans le cas de Cîteaux, ce que l'on peut constater tout au long de l'histoire monastique.  Chaque fois que le monachisme connaît un moment de croissance particulière ou de renouveau, c'est toujours lorsqu'une communauté ou un groupe de moines ou moniales sont particulièrement attentifs ou présents à la culture humaine et spirituelle ainsi qu'aux aspirations spirituelles des hommes et des femmes de leur temps et savent incarner dans leur vie une réponse adéquate à ces aspirations.

 

 

                                                                                    Armand VEILLEUX





     [1] Texte d'une conférence donnée à la CFC, en novembre 1993.  On voudra bien excuser le style télégraphique de ces notes; elles n'étaient qu'un aide-mémoire pour le conférencier et n'étaient pas destinées à la publication.

     [2] Voir Raimundo PANIKKAR, Blessed Simplicity:  The Monk as Universal Archetype, (In dialogue with Ewert COUSINS, Cornelius THOLENS, Myriam DARDENNE, Armand VEILLEUX, M. Basil PENNINGTON, and Paolo SOLERI).  New York, Seabury Press, 1982. Voir aussi J. LECLERCQ, "Le monachisme comme phénomène mondial" dans Le Supplément; 107 (1973) 461-478;  et 108 (1974) 93-119. Comme étude fondamentale sur la question, bien que non consacré directement au phénomène monastique, voir: Julien RIES et al., Homo Religiosus.  1. L'expression du sacré dans les grandes religions.  I. Proche-Orient ancien et traditions bibliques (Louvain-la-Neuve:  Centre d'Histoire des Religions), 1978.

     [3] J'ai traité de cet aspect dans "The Role of the Monastic Subculture in the Formation of the Monk", in Tjurunga, no. 14 (1977), 109-124; traduction française: "Le rôle de la sous-culture monastique dans la formation du moine", dans La Nouvelle Revue Théologique 100 (1978), p.  734-749.

     [4] J'ai décrit cette évolution dans: Evoluzione della vita religiosa nel suo contesto storico-spirituale, dans: Per una presenza viva dei religiosi nella chiesa e nel mondo, Turin 1970, 13-44; trad. française: "Évolution de la vie religieuse dans son contexte historico-spirituel", dans Collectanea Cisterciensia 32 (1970), 129-154.

     [5] La plus grande partie des études sur l'"abbé" se réfèrent surtout à cette fonction du père charismatique.  Parmi beaucoup d'autres on pourra consulter:  L. Dürr, Heilige Vaterschaft im antiken Orient.  Ein Beitrag zur Geschichte der Idee des "Abbas", in Heilige Überlieferung, Festgabe I. Herwegen, Münster i. W., 1938, pp. 1-20;  F. von Lilienfeld, Anthropos Pneumaticos.  Pater Pneumatophoros : Neues Testament und Apophthegmata Patrum, in Studia Patristica V (Texte une Untersuchungen - 80), Berlin, 1962, pp. 382-392;  H. van Cranenburgh, "De plaats van de 'abbas' als geestelijke vader in het oude monachisme", in Tijdschrift voor geestelijk leven 20 (1964), pp. 460-480.

     [6] Cf. G. Bardy, article "Didascale" dans Catholicisme, III (1952), col.749; A. Lemaire, Les Ministères aux origines de l'Église, Paris 1971.

     [7] Cf. I Tim 2:7; 2 Tim 1:11; Eph. 4:11; I Cor 12:28.

     [8] Cf. G. Bardy, "Aux origines de l'École d'Alexandrie", in Recherches de Science Religieuse, 27 (1937, 65-90; "Pour l'histoire de l'École d'Alexandrie", dans Revue Biblique, 50 (1942), 80-109.

     [9] Cf. G. Fowden, The Platonist Philosopher and his Circle in Late Antiquity;  et Idem, The Egyptian Hermers: A historical approach to the late pagan mind.

     [10] Cf. H. Crouille, "Origène, précurseur du monachisme", dans Théologie de la Vie monastique (Théologie - 49), Ligugé, 1961, pp. 18-21.  La situation était la même dans d'autres parties de l'Église.  Cf., par exemple, Jean Chrysostome et Théodore de Mopsueste, qui appartenaient à un groupe réuni autour de Théodore de Tarse; voir J. Daniélou, "La direction spirituelle dans la tradition ancienne de l'Eglise," dans Christus, no. 25,7 (1960), pp. 7-8.

     [11] J'ai publié une traduction française de la Vie de Pachôme:  La Vie de saint Pachôme selon la tradition copte. Traduite du copte par Armand  Veilleux.  (Spiritualité Orientale --38), Bellefontaine 1984, ainsi qu'une traduction anglaise de l'ensemble du dossier Pachômien:  Pachomian Koinonia.  The Lives, Rules, and Other Writings of Saint Pachomius and his Disciples.  Vol. 1: The Life of Saint Pachomius and his Disciples; Vol. 2: Pachomian Chronicles and Rules; The Lives, Rules, and Other Writings of Saint Pachomius and his Disciples; Vol. 3: Instructions, Letters, and Other Writings of Saint Pachomius and his Disciples.  Cistercian Publications, Kalamazoo, 1980-1982.

     [12] Cf. Philip ROUSSEAU, Pachomius.  The Making of a Community in Fourth-Century Egypt, Univ. of California Press, Berkeley 1985, pp. 1-36; Samuel RUBENSON, The Letters of St. Antony. Origenist Theology, Monastic Tradition and the Making of a Saint.  Lund University Press, 1990, pp. 89-95)avec ample bibliographie).

     [13] Sur le mouvement baptiste: Cf. J. Thomas, Le mouvement baptiste en Palestine et en Syrie (150 av. J.C. - 300 ap. J.C.).

     [14] J'ai décrit cette évolution dans Evoluzione della vita religiosa nel suo contesto storico-spirituale, in Per una presenza viva dei religiosi nella Chiesa e nel mondo, Turin 1970, 13-44. Voir aussi: R. LORENZ, Die Angänge des abendländischen Mönchtums im 4. Jahrhundert, in Zeitschrift für Kirchengeschichte 77 (1966), 1-61.

     [15]  Pages 341-365.

     [16] Pour une bonne présentation succincte de cette période monastique, voir le chapitre III de  García M. Colombás, La tradición benedictina, vol. III, pp. 87-136 (avec ample bibliographie).

     [17] Sur le monachisme carolingien on pourra voir: J. Koschek, Klosterreform des Ludwig des Frommen, Greiswald, 1908; J. Narberhaus, Benedikt von Aniane,  Werk und Persönlichkeit, Münter, 1930; Mélanges colombiens, Luxeuil, Paris, 1931; Settimane di studio del Centro italiano di studi sull'alto Medioevo, t. IV: Il monachesimo nell' alto Medioevo e la formazione della civiltà occidentale, Spoleto, 1957. F. Prinz, Fruhes Mönchtum in Frankreich, Munich, Vienna, 1965; J. Wollasch, Mönchtum des Mittelalters zwischen Kirche und Welt, Munich 1975. F. Prinz, Askese un Kultur, vor- und frühbenediktinisches Mönchtum an der Wiege Europas, Munich, 1980;  J. Felten, Äbte und Laïenabte im Frankenreich, Stuttgart, 1980.

     [18] Il y a une bibliographie extrêmement étendue sur l'abbaye de Cluny.  Le livre du Père  Kassius Hallinger, Gorze Kluny.  Studien zu den monastischen Lebenformen und Gegensätzen im Hochmittelalter, 2 vol. Roma, 1951 demeure toujours classique.  On pourra consulter également  Spiritualità cluniacense, Atti del 21 congresso del Centro di studi sulla spiritualità medievale, Todi, 1960; P. Lamma, Momenti di storiografia cluniacense, Roma, 1961; J. Fechter, Cluny, Adel und Volk.  Studien über des Verhältnis des Klosters zu den Ständen (910-1156), Tübingen, 1966.